Les beaux esprits nous rabâchent sans cesse que l’enfant est
roi dans nos sociétés et quelques «spécialistes» de l’enfance venus d’un autre
âge nous demandent de revenir à la «bonne vieille éducation» où l’on apprenait
à nos rejetons à n’être que des «êtres en devenir», donc à demeurer à leur
place de «mineurs», en quelque sorte de sous-humains.
Et puis, voilà que sortent les sempiternels empêcheurs de
dormir tranquille sur ses certitudes que tout va bien pour l’enfant, je veux
parler de ces statistiques qui ne sont malléables que pour ceux qui ne veulent
rien voir et ces faits divers qui s’accumulent presque toujours autant et qui
nous disent, sans artifice, sans tournure de phrase savante, que l’enfant n’est
pas respecté, pire, qu’il est battu, violé, violenté et même assassiné dans
notre soi-disant «société permissive» où c’est lui qui commande, où c’est lui
qui est un danger pour la tranquillité des bons citoyens, m’en parler pas,
madame, tous des voyous et des mal-élevés.
Alors, devant le énième appel, la nouvelle pétition, utiles
pour nous rappeler que les problèmes demeurent, les pouvoirs publics font de
beaux discours et nous jurent que l’on va prendre le problème à bras le corps.
C’est, par exemple, ce que nous dit Agnès Buzyn, la ministre
de la Santé dans une interview à Elle.
«Il y a (...) une part de déni, explique-t-elle fort
justement. La très grande majorité des enfants qui meurent aujourd'hui du fait
de violences sont tués au sein du cercle familial. Il faut oser le dire et
sortir d'une vision idyllique de la famille. Toutes ne sont pas bientraitantes.
C'est une réalité inacceptable, mais c'est la réalité»
Ce qu’elle ne nous dit pas c’est qu’aujourd’hui, dans le
gouvernement d’Edouard Philippe, sous la présidence d’Emmanuel Macron, il n’y a
aucun ministère, pas le plus petit secrétariat d’Etat, dédiés à l’enfance, une
décision malheureuse totalement assumée par le chef de l’Etat et que tous ceux
qui sont préoccupés par la défense de l’enfance juge comme une infamie.
Sans oublier qu’il n’est pas revenu non plus sur la suppression
du défenseur des enfants (c’est bien vrai, les enfants, ça se défend tous
seuls!).
Mais, soyons un peu patient car elle nous annonce qu’elle va
nous présenter sa «stratégie de protection de l’enfance», fin novembre, soit un
an et demi après l’élection d’Emmanuel Macron à l’Elysée.
Sans doute que la réforme de la SNCF ou le loto en faveur
des vieilles pierres étaient plus importants que de mettre en place cette
stratégie le plus rapidement possible…
Espérons simplement que celle-ci soit étoffée, efficace et
bénéficie des crédits nécessaires à son application.
Sinon, elle sera comme les autres stratégies adoptées au fil
des ans, de belles paroles qui glisseront sur les faits divers les plus
scabreux et les statistiques les plus déprimantes.
Celles-ci, citées dans la pétition «Le massacre des
innocents» (la
consulter ici), se passent de commentaire:
«En France, chaque semaine, 2 enfants meurent sous les coups
et les tortures, 73.000 cas de violences sur mineurs sont identifiés par les
forces de police chaque année, soit 200 par jour; 300.000 enfants sont pris en charge
par l’ASE (Aide sociale à l’enfance) et 160.000 sont retirés à leur famille.
Ces maltraitances sont le plus souvent connues des services
sociaux, des voisins, des juges, qui tous maintiennent ces enfants chez leurs
bourreaux.
En France, 7.000 viols de mineurs sont officiellement
recensés chaque année, soit presque 20 par jour. C’est 44% des viols commis
dans notre pays. La moitié des victimes de viols et d’agressions sexuelles ont
moins de 12 ans. Seulement 2% des cas donnent lieu à une condamnation.»
Dormez bien les beaux esprits et rêvez bien de votre «enfant-roi»…
Alexandre Vatimbella